September 1, 2013

Les contours invisibles

 Il fit sursauter ses paupières comme un dément mais avec dans l'intention du geste, de la douceur. Comme s'il cherchait la pulsion du cœur et l'électricité du mouvement même initié. Il partait de ce qui se projetait sur sa rétine pour se détourner du flou artistique des formes de son bureau, de son pot à crayon, de son bazar... Son regard atterrit sur les courbes de sa nuque pour deviner les contours invisibles d'un fantôme par dessus son épaule. Il n'y avait rien, rien d'autre que le néant qui le séparait de son envie de faire d'un rien tout un monde. Il se frotta les yeux et comme à chaque fois, dans le noir de ses pensées et à la lumière du jour, il avait beau constater que la page restait blanche sans en ressentir une frustration des plus déplaisante, il savait ce qu'il avait à dire et tout ce qui restait muet. Il y avait ces mots et ces images qui se mélangeaient dans une danse unique dont les pas touchaient les fibres du papier vierge de ses carnets. Il y avait des mélodies en formes de lettres colorées que son stylo peignait en prose que sa main égrenait en tout temps en tout lieu sur tous les supports. Des cordes vocales en passant par la voix mentale, il se perdait dans une sorte de tectonique des plaques de l'imaginaire et du réel troublées par le doute et la visée même de l'acte d'écrire.


À force d'essayer, il se perdait dans un labyrinthe fait de couloirs en béton armé. Il se barricadait dans une solitude qu'il jugeait nécessaire à la floraison de l'accomplissement de toute cette fichue pulsion. De l'instantané prémédité dont la délivrance rêvée pénètre les calques et les couches sereines de tout ce qu'il lui manque pour achever une ligne, une page, un livre...