September 5, 2013

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September 1, 2013

Règlement de compte

Dimitri cherchait Quentin à tâtons dans le lit. Il ouvrit les yeux qui laissèrent pénétrer la lumière de la lampe posée sur le bureau. « Qu'est-ce que tu fais debout à cette heure ?
  • Je réfléchis.
  • À quoi ?
  • À rien. » Il y eut un silence que les ronronnements saccadés d'Einstein gênaient l'émotion de Quentin.
« Viens te coucher.
  • Je pense à Anna.
  • À quoi bon ?
  • Je me sens coupable.
  • On est en droit de se sentir coupable tous les deux tu sais ? Allez viens me rejoindre. Je me sens tout nu sans toi. »

Quentin se leva, enfila l'un des longs t-shirts de Dimitri, passa devant celui-ci sans même le regarder. Il referma la porte derrière lui. Dimitri ne cherchait pas à le retenir davantage. Il comprenait son sentiment. Faustine avait pour lui une hostilité qui lui était tout aussi difficile à dissimuler ce qui rendait l'air de l'appartement plus lourd encore que les vagues de chaleur de l'été.


* * * * * * * * * *

Il y avait cette nuit-là quelque chose d'anormal. Faustine n'arrivait pas à trouver la position qui la déroberait au monde réel pour embrasser l'imaginaire et l'intouchable de la nuit. Le désordre des vecteurs de ses bras et de ses jambes dessinait des courbes cassées en vrac sous le drap blanc duquel l'empreinte et l'odeur de son aimé étaient absentes. Seule au féminin de son essence. Il lui manquait la rugosité du torse de Chayim sur lequel elle aimait tant faire danser ses doigts entre ses poils. Elle soupire, se lève et part s'asseoir dans la cuisine.
Du silence à ne plus savoir quoi en faire. Sa tasse résonne comme si elle avait jeté un sac de bille sur la faïence de l'évier. Les canalisations pompent une eau qui peine à se rafraîchir des profondeurs des stations de la ville jusqu'au bord de ses lèvres sèches. Elle entend la porte de la chambre s'ouvrir.
Le temps d'un instant, elle crut qu'Anna allait sortir de la chambre mais elle faisait face à Quentin qui freina son élan aussi sec. « Assieds-toi crétin. Ça va être difficile de s'éviter de toute façon. Alors arrête de faire semblant d'être surpris de me voir à chaque fois que l'on se croise.
  • Il est trois heure du mat' Faustine. On peut pas attendre qu'il fasse jour pour se jeter des politesses à la tête ?
  • Maigre euphémisme. Allez. Assieds-toi je te dis. C'est toujours mieux que d'être chacun dans notre coin.
  • Tu n'arrives pas à dormir.
  • C'est la deuxième fois que Chayim ne rentre pas cette semaine. Je m'inquiète un peu.
  • Tout va bien entre vous ?
  • Oui. Enfin je crois. J'en sais rien, fit-elle en baissant la tête. Puis j'ai pas envie de t'en parler.
  • Bon, puisqu'on est là tous les deux. Tu pourrais peut-être enfin me cracher ton venin. Je sais que tu en meurs d'envie.
  • Ne me fais pas passer pour la connasse de cette histoire.
  • J'ai jamais dit ça.
  • Alors qu'est-ce que tu as à me dire ?
  • Qu'il serait bon que tu comprennes que c'est aussi difficile pour moi de réaliser qu'Anna ait quitté l'appartement à cause de moi.
  • À cause de VOUS !. Dimitri n'est pas tout blanc.
  • Alors c'est quoi ton problème avec moi.
  • Par où commencer ? T'es dans la merde et on te propose de venir vivre avec nous et tu voles Dimitri à Anna. T'es sûr qu'il n'y a rien qui cloche dans cette affaire ?
  • Alors laisse-moi te dire une chose ma belle. T'es effectivement la connasse de cette histoire. Dimitri et moi, c'est arrivé comme on tombe d'une chaise. On n'a rien demandé et Anna devait bien finir par le savoir un jour ou l'autre.
  • Certainement pas de la façon dont elle l'a découvert.
  • Certes. Et alors ? Ce qui est fait est fait.
  • T'as toujours réponse à tout comme ça ?
  • Là pour le coup, je ne vais pas me gêner et j'aurai le dernier mot. Je comprends très bien que tu m'en veuilles tout particulièrement mais tu es odieuse avec moi et il faut vraiment que ça cesse.
  • T'as qu'à déguerpir tu sais. Personne te retient...

La porte de la chambre s'ouvrit violemment. Dimitri déboula sur Faustine et la gifla. « Et tu sais très bien que tu ne l'as pas volée celle-là ! » Faustine resta figée un moment et quitta la pièce en claquant la porte. « Tu n'aurais pas du faire ça Dimitri.

  • Tu te moques de moi ? Tu comptais te laisser insulter sans rien faire.
  • Je ne serai sûrement pas allé jusqu'à...
  • C'est tout ce que j'ai trouvé à faire sur le coup.
  • Et tu feras quoi quand elle en parlera à Chayim ?
  • J'en sais rien et je m'en fous. Elle est infâme cette nana. Elle a perdue sa seule amie alors il faut qu'elle devienne invivable ? Je ne suis à moitié étonné que Chayim rentre de plus en plus tard. Depuis le départ d'Anna, tout le monde essaie de faire en sorte de tenir l'appartement en ordre mais madame « trouve » de la drogue par hasard et passe son temps complètement à l'ouest. Je veux bien admettre qu'elle soit loufoque et quand bien même, y a pas tant de mal à ça. Mais elle devient de plus en plus irrationnelle. Elle et Chayim ne couchent même plus ensemble et elle se venge sur toi à la moindre occasion. Trop c'est trop. »

Les contours invisibles

 Il fit sursauter ses paupières comme un dément mais avec dans l'intention du geste, de la douceur. Comme s'il cherchait la pulsion du cœur et l'électricité du mouvement même initié. Il partait de ce qui se projetait sur sa rétine pour se détourner du flou artistique des formes de son bureau, de son pot à crayon, de son bazar... Son regard atterrit sur les courbes de sa nuque pour deviner les contours invisibles d'un fantôme par dessus son épaule. Il n'y avait rien, rien d'autre que le néant qui le séparait de son envie de faire d'un rien tout un monde. Il se frotta les yeux et comme à chaque fois, dans le noir de ses pensées et à la lumière du jour, il avait beau constater que la page restait blanche sans en ressentir une frustration des plus déplaisante, il savait ce qu'il avait à dire et tout ce qui restait muet. Il y avait ces mots et ces images qui se mélangeaient dans une danse unique dont les pas touchaient les fibres du papier vierge de ses carnets. Il y avait des mélodies en formes de lettres colorées que son stylo peignait en prose que sa main égrenait en tout temps en tout lieu sur tous les supports. Des cordes vocales en passant par la voix mentale, il se perdait dans une sorte de tectonique des plaques de l'imaginaire et du réel troublées par le doute et la visée même de l'acte d'écrire.


À force d'essayer, il se perdait dans un labyrinthe fait de couloirs en béton armé. Il se barricadait dans une solitude qu'il jugeait nécessaire à la floraison de l'accomplissement de toute cette fichue pulsion. De l'instantané prémédité dont la délivrance rêvée pénètre les calques et les couches sereines de tout ce qu'il lui manque pour achever une ligne, une page, un livre...  

Un bref épisode de la vie d'Anna dans la 3ème partie de DARK MATTER

 Elle se réveillait en s'étirant de tout son long et la première chose qui vint lui caresser les narines fut l'odeur du café chaud. Du café frais qui revigore. En se redressant, elle aperçu des coins des yeux, d'un côté, de lourds billets jetés en vrac sur la table de chevet et de l'autre, une ombre fumante qui surgissait du cadre de la porte de la chambre et dont une voix étrangère récita d'un air monotone : « Je te veux dehors dans cinq minutes. Prends ton pactole et ne cherche pas à me revoir. » Elle se réveilla pour de bon, se rhabilla dans le seconde et récupéra toutes ses affaires. L'ombre avait disparu. Elle tourna la tête, hésitante, puis se jeta sur l'argent qu'elle fourra dans ses poches avant de s'engouffrer dans le couloir de l'entrée dont elle referma la porte une fois de l'autre côté. Elle dévala les escaliers et commença une longue marche loin de cet immeuble qu'elle ne daigna pas regarder. Elle allait de l'avant en comptant ses sous. C'était un pauvre type de toute façon, se disait-elle à chaque fois qu'on ne lui payait même pas le café. La journée ne faisait que commencer et elle s'ennuyait déjà. Il fallait qu'elle retourne à l'appartement prendre une douche et rejoindre les autres.